Meneuse augmentées
Tldr ;
Joueuse : Les jeux de rôles assistés par ordinateur sont fun. Jouez-y.
Conceptrice : Le jdr assisté par ordinateur offre des possibilités intéressantes qui mériteraient d'être développée.
Il fallait s'attendre tôt ou tard à l’augmentation cérébrale par la technologie. Les meneuses sont fortement sollicitées durant une partie. Elle doit appliquer et faire appliquer les règles (rôle d'arbitre). Elle doit gérer les dynamiques autour de la table, les prises de parole, les conflits, entretenir une dynamique de groupe (rôle de médiatrice). Elle doit créer et entretenir une ambiance (rôle de conteuse). Elle doit interpréter des personnages (rôle d'actrice). Elle doit créer des situations, des évènements, de l'action (rôle d'auteure). Bien sûr ces différents rôles sont minorés selon ce que les règles permettent ou non. Par exemple, certaines règles assistent la meneuse dans son rôle d'auteure en créant des situations, en forçant la meneuse à répondre aux actions des joueuses dans certains cas ou simplement via un jeu de tables aléatoires. Même si elles donnent le meilleur d’elles-mêmes, il n’est pas rare que des ratés s’immiscent dans une partie. La naissance d’inégalité (et donc de conflit) par l’oubli de l’application d’une règle, une joueuse timide oubliée à un coin de la table, du PvP mal géré, bref la meneuse est un être humain, elle est faillible. Alors pourquoi tant d’éléments essentiels pour qu’une partie se déroule bien sont entre ses mains. Mais autant de bavures n’est pas une fatalité. Ce que je vous propose ici n’est pas une recette miracle pour rendre la meneuse infaillible mais une augmentation la meneuse via un implant cérébral pour se décharger d'une partie d’un rôle. Bon OK... pas d’implant mais une application.
De l’informatique en jdr
Un jeu de rôle contient par nature une aventure imaginaire régie par des règles. Si on veut utiliser une application pour gérer ces règles, il faut qu’elle soit informée des évènements se déroulant dans l’espace fictionnel, qu’elle les identifie et qu’elle fasse appliquer la(les) règle(s) concernée(s), ce que fait la meneuse dans son rôle d’arbitre basique. Le domaine de l’intelligence artificielle ne permet pas de faire ça pour l’instant. Il ne sera donc pas possible de remplacer entière la meneuse. Alors comment l’assister ? Les ordinateurs sont très bons avec les nombres et avec les séquences logiques. Un problème se pose : nous ne sommes pas sur le même plan que l’ordinateur. Il n’a pas accès à nos informations, encore moins à l’espace fictionnel créé et la plupart d’entre nous n’avons pas accès à ses rouages. Comment trouver une surface d’accroche entre les deux mondes ? Comment intégrer la machine à la table ?
L’intégration
La question de l’intégration n’est pas évidente de prime abord. Tout semble opposé le plan de la partie et le plan de l’application. La partie est basée sur l’imaginaire et est donc dynamique alors que l’application est rigide sans aucune intelligence. L’application n’a aucune connaissance des évènements fictionnels. Les seuls moyens d’interaction sont ceux de l’interface graphique prévus initialement par le développeur.
J’ai développé ma première approche via la Game Chef 2016, le thème étant justement Technologie. Ma réponse a la question de l’intégration a été une suite logique d’évènements. Cela a donné un jeu (Une Promenade Spatiale http://marmous.net/ups/PromenadeSpatiale.pdf) se situant à mi-chemin entre jeu de rôle et jeu de plateau. Jeu de rôle car on y incarne plusieurs personnages. Jeu de plateau car le jeu a un début et une fin et il est possible de gagner ou de perdre. Le jeu prend la forme d’un voyage spatial. Le but des joueuses est d’arriver à bon port. Lorsque le voyage se passe bien les personnages sont en état de stase cryotechnique et évoluent dans une réalité virtuelle. Mais des incidents surviennent dans le vaisseau, les obligeant à s’extraire de la réalité virtuelle pour les régler. Ainsi le jeu est composé d’une partie régie par l’application et d’une partie gérée par les joueuses. L’application est responsable du démarrage et de la fin de la partie, de la préparation des joueuses pour leur entrée dans la réalité virtuelle, du déclenchement des incidents et de la gestion des points de vie du vaisseau.
Dans cet exemple d’intégration, il y a bien une intégration de l’application dans le jeu mais pas dans l’espace « jeu de rôle », le jeu est séparé en deux parties. Malgré tout cela en fait un jeu coopératif one-shot facile à prendre en main. La seule préparation nécessaire est la lecture du manuel. Cependant l’objectif est accompli car la meneuse ne gère pas la structure de la partie. Toutes les joueuses se laissent guider par l’application.
Ma seconde approche a été l’inverse : un jeu de rôle utilisant une application à certains moments clés du jeu. Je pense que cette approche mérite d’être développée. Je l’ai formalisé sous la forme du jeu Les Sels de Millevaux (http://marmous.net/lsm/LesSelsDeMillevaux-beta.pdf) où il est question de réaliser le grand œuvre alchimique dans l’univers forestier de Millevaux créé par Thomas Munier. L’application ne sert pas de structure pour le jeu entier. Elle sert de structure pour la réalisation de chaque phase d’élaboration du grand œuvre. La structure de ces phases est scriptée, tout en laissant une marge de manœuvre satisfaisante aux joueuses. Ainsi une partie des règles est abstraite permettant aux joueuses d’être plus attentives au reste.
Avantages
Les bénéfices de l’assistanat par ordinateur sont satisfaisants par rapport aux attentes :
- l’ordinateur de part sa nature d’exécutant est un arbitre impartial. Il applique toujours les même règles. Aucun oubli ou traitement de faveur.
- il rend possible l’abstraction de règles (ou calculs) complexes
- il permet aux joueuses d’être disponible pour le reste de la partie (narration, dynamique de groupe, …)
Mes recherches sur les jdr assistés par ordinateur ont donné une seule piste d'intégration pour l'instant : l'assistanat d'éléments scriptés. Les deux raisons principales sont la facilité de réalisation de ce genre d'application pour un seul développeur et les contraintes techniques qui deviennent assez fortes à parti du moment où l'on veut être compatible avec les PC et les tablettes. Je voulais également qu'il y ait un apport significatif, si l'application prend 1 minutes à être paramétrée alors qu'elle remplace un jet de dé (1 seconde) il n'y a pas de plus-value.